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La spéculation est un terme qui fait débat. Car en fonction du contexte ou des interlocuteurs, l’interprétation que l’on en fait est différente. Pourtant, la définition est claire, limpide comme de l’eau de roche.
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Qu’est-ce que la spéculation ?
La spéculation est l’action d’anticiper une variation du prix d’un bien (hausse ou la baisse) pour en effectuer un achat ou une vente dans le but d’en tirer profit.
Si l’on en reste à cette simple définition, tout investisseur pourrait se voir être accuser d’être un spéculateur dans l’âme. Je connais peu de gens mettant de l’argent dans un placement quelqu’il soit pour en perdre… Alors qu’est-ce qui fait la différence entre un investisseur et un spéculateur ?
Spéculation ou investissement : bonnet blanc et blanc bonnet ?
La différence majeure entre le spéculateur et l’investisseur réside dans son intention première. La spéculation a un seul objectif : la maximisation du profit. Il existe des éléments factuels permettant de les distinguer.
Voici un tableau reprenant les principaux critères de comparaison :
Spéculation | Investissement | |
Durée de placement | Courte | Moyenne/Longue |
Niveau de risque | Important | Faible/Moyen |
Processus de choix | Lié à une intuition. Cycle de décision rapide | Fondé sur un modèle économique ou de marché. Cycle de décision long |
Facteur de limitation du risque | Durée de placement courte et montant d’investissement faible | Stratégie de diversification des acquisitions |
Résultats attendus | Très fort en terme de performance financière | Performance proportionnelle aux risques pris par l’épargnant. Motivations extra-financières (patriotisme économique, ESG, réponse à un objectif patrimonial long terme…) souvent affichées par l’investisseur |
A la lecture rapide du tableau, on s’aperçoit très vite que nous sommes sur deux profils très différents :
- D’un côté, la spéculation s’appuie sur une stratégie agressive de recherche de performance rapide quelqu’en soit la manière. La spéculation s’affranchit des critères moraux en occultant les effets induits.
- De l’autre, l’investissement repose sur la volonté de répondre à un besoin patrimonial par le biais de solutions de placement long terme. La notion de pérennité et de stabilité prend tout son sens.
Mais la question que l’on peut légitiment se poser est de savoir si nous avons toutes et tous quelque chose d’un spéculateur en nous ?
Le saviez vous ?
Une anecdote pour prendre un peu de recul
Je tenais à vous faire partager une anecdote d’un ami banquier tournant en dérision la volonté farouche du spéculateur de gagner de l’argent selon une simple intuition :
Savez-vous ce qu’est un investissement long terme ?
Il s’agit d’un investissement court terme qui a foiré…
Merci Vincent pour cette réflexion riche en enseignements !
A qui s’adresse la spéculation ?
Et bien intrinsèquement, la spéculation est un concept séduisant. Gagner rapidement de l’argent avec peu d’efforts : qui ne serait pas conquis ? Si en plus on vous fait miroiter un risque quasi inexistant grâce à une recette miracle (processus de choix des valeurs, fonds à protection conditionnel…), il y a de quoi signer tout de suite pour de telles solutions. Cela vous fait peut-être penser à des publicités vu sur Internet au passage… Mais d’un point de vue pratique, elle est bien plus complexe à mettre en place pour plusieurs raisons.
Un marché d’initiés si vous ne voulez pas être le dindon de la farce
Pour tirer profit d’un écart important entre la valeur d’achat d’un bien matériel ou immatériel et sa valeur de revente cela nécessite de nombreuses compétences :
- L’accès à de l’information privilégiée. Si vous comptez gagner de l’argent en bourse en spéculant uniquement sur les nouvelles fournies par les brokers ou les traders sur des plateformes de trading, vous allez être très rapidement déçus. Une information n’a de la valeur que si elle est connue d’un petit nombre de personnes !
- La capacité d’analyser des messages faibles. Lorsque l’on s’intéresse à un marché, il faut s’avoir décoder la moindre information, même si elle semble insignifiante. Car souvent, les perspectives de gains se trouvent dans des messages ou informations peu diffusées au grand public.
- Fuyez les effets de mode. Quand on dit chez moi, une fois que l’on parle d’une bonne affaire au journaux TV de 20 heures, c’est qu’il y a des acteurs qui souhaitent trouver des contreparties pour gagner de l’argent en séparant de biens. Car sur un marché, pour qu’un vendeur puisse s’enrichir, il faut qu’il y a ait un acheteur qui lui achète son bien à bon prix. Et le plus dur en gestion de patrimoine est de vendre un bien, surtout si sa valeur n’a fait que de monter. Vous voulez avoir un exemple concret ? Je pense que vous vous souvenez encore la dernière bonne affaire en date : le bitcoin.
Un frein éthique important de la part de l’épargnant
De plus en plus d’épargnant sont sensibles au caractère environnemental ou socialement responsable que peut prendre leurs placements. Au delà de la perspective de gains, l’affect rentre de plus en plus en ligne de compte. Gagner de l’argent, oui. Mais surement pas à n’importe quel prix.
La spéculation est l’anti-thèse de cette mouvance comme nous allons le voir. Car au final, on peut spéculer sur tout ! De la même manière que l’on peut parier sur tout… Si vous ne me croyez pas, demander à nos amis anglais.
Quels sont les moyens de spéculer ?
Contrairement aux apparences, la bourse n’a pas le monopole de la spéculation. Elle focalise tous les regards car elle a le mérite d’offrir un marché organisé aux investisseurs pour leur permettre de réaliser leurs gains facilement. N’oubliez jamais que pour vous enrichir, il faut acheter à bon prix mais surtout pouvoir revendre votre investissement au bon moment ! Voyons ensemble quelques exemples pour étayer mes propos.
La spéculation immobilière
L’immobilier, de part l’investissement à crédit, reste un investissement très prisé des particuliers. Si une banque ou un établissement de crédit vous suit, vous aurez la possibilité d’acheter un bien valant plusieurs centaines de milliers d’euros sans débourser un sou de votre poche. Alors comment en retirer de l’argent à court terme ?
Etape 1 : Trouver un bien décôté
Ce n’est pas foncièrement la partie la plus compliquée de trouver des biens immobiliers décotés sur le marché. Les raisons peuvent être multiples :
- Le désamour des grandes surfaces. Avec un prix au mètre carré de plus en plus cher, les grandes surfaces trouvent de moins en moins acquéreur. Et mécaniquement, moins un bien est convoité, et plus il perd de la valeur !
- Le mauvais état des biens à vendre. Il n’est pas rare que les biens immobiliers ne soient pas en bon état au moment de leur revente. Souvent c’est parce que les travaux coutent chers. Dès lors qu’il n’y a pas d’obligations ou de périls sur le bâtiment, les propriétaires ont tendance à repousser l’échéance. Je vous laisse imaginer une maison sans travaux d’entretien au bout de 40 ans !
- Les successions qui se passent mal. En cas de mésentente lors d’une succession mal préparée, les biens peuvent se retrouver sans entretien et sans possibilité de revente. Jusqu’au jour où la situation financière devient intenable pour les héritiers…
Etape 2 : Evaluer le potentiel du bien et la faisabilité du projet
Vous avez peut-être acheté moins cher votre bien, mais pour autant, saurez-vous en tirer profit ? Tout est là l’enjeu de la spéculation. Car entre un prix de vente estimée et la réalité du marché, il peut y avoir un écart conséquent. Une règle de d’or en immobilier pour valoriser les mètres carré est d’acheter en bloc pour revendre à la découpe. Cela vaut aussi bien sur les terrains que l’immobilier bâti. De plus en plus de projets de division voient le jour :
- côté des terrains, cela passe par un aménagement du sol pour créer de nombreuses parcelles,
- côté habitation, l’investissement en colocation meublée à le vent en poupe pour rentabiliser au maximum le prix du loyer au mètre carré.
Plus rare, mais qui peut s’avérer beaucoup plus rentable, l’achat de bois ou de surface agricole en espérant qu’elle passe dans le domaine des terrains constructibles. Une autre facette de la spéculation immobilière qui peut être extrêmement rentable mais à une échéance beaucoup plus lointaine.
La spéculation financière
Dès lors que vous avez des sommes d’argent dédiées à l’épargne, vous avez la capacité de spéculer. La spéculation financière est la plus répandue. La principale raison : elle ne nécessite pas un capital élevé pour se mettre en place. Il existe de nombreux produits sur le marché permettant de laisser libre court à sa soif de gagner rapidement beaucoup d’argent. Mais attention au revers de la médaille…
Etape 1 : trouver un thème d’investissement
La partie la plus complexe de la spéculation est de trouver une thématique d’investissement sur laquelle vous avez des convictions. J’ai un ami qui pendant longtemps à spéculer sur les indices à partir de produits dérivés à barrière désactivante. Mais en suivant ses investissements, cela ressemblait plus à une sorte de casino financier basé sur des intuitions plutôt qu’à la découverte d’un filon pouvant l’amener à la richesse. La preuve, c’est qu’il n’a jamais réussi à en vivre ! Nous pourrions évoquer le bitcoin qui se trouve dans la même logique, ne reposant sur aucun fondement économique. Mais je vous propose de prendre un exemple qui pourrait s’avérer toujours d’actualité avec une matière première surnommée “l’Or Noir” : le pétrole.
Exemple de spéculation financière : le pétrole
Le pétrole a toujours été au centre des attentions dans nos économies modernes. Véritable baromètre de l’activité, il est pourtant utilisé à d’autres fins que l’échange de matières premières, comme outil de guerre commerciale ou de spéculation.
UN POTENTIEL DE HAUSSE IMPORTANT
Gardez en tête qu’en 1961, le baril de pétrole valait 1,53 $. A la fin de l’année 2007, le pétrole était redevenu un centre d’attention des investisseurs. Toutes les matières premières avaient profiter du cycle économique favorable. Et les spéculateurs cherchaient des signes de pénuries pour se lancer dans une campagne d’investissement massive. Le pétrole semblait cocher toutes les cases avec :
- une demande grandissante avec le développement effréné du plastique et du secteur automobile en Chine,
- des stocks estimés ne pouvant faire face durablement à la demande croissante,
- un marché d’échange au format papier organisé. Voir même trop organisé, si on regarde quelques articles de l’époque…
Si vous vous souvenez bien, le prix du baril se situait aux alentours des 90 $. J’ai eu l’occasion de participer à une réunion de gestion du plus grand gestionnaire de fonds mondial. Celui-ci dans son scénario central prévoyait sous 5 ans un prix du baril à 300 $ avec encore de belles perspectives de hausse sous couvert de pénurie de l’offre.
L’IMPORTANCE DES DETECTER LES SIGNAUX FAIBLES
Et ce jour là, je me souviens qu’il y avait un analyste d’une autre banque spécialisée dans les produits dérivés qui a juste fait une remarque comme quoi sur le marché américain 60% des échanges de pétrole se faisait à travers des produits financiers, et non par des échanges physiques. Une remarque qui valait pour le coup beaucoup d’argent ! Car les cours ont continués à flamber jusqu’en 2008 pour atteindre les 140 $ au mois de juillet avant de s’écrouler. Si nous prolongeons l’histoire à nos jours, le prix du baril a atteint son plus bas histoire depuis 17 ans en 2020 avec un cours à 20 $. Cette anecdote doit nous rappeler plusieurs choses :
- une réalité peut évoluer dans le temps. Car la technologie avec la découverte de nouveaux gisements exploitables cumulé au développement du gaz de schiste nous a montré que le pétrole avait encore de beaux stocks devant lui,
- les signaux faibles sont un excellent indicateur d’investissement, même dans une démarche spéculative. Surtout si vous souhaitez être un investisseur heureux dans ces choix.
Etape 2 : évaluer le risque financier réel
Lorsque l’on parle de spéculation, on pense tout de suite que l’on peut perdre la grande majorité de son argent, voir la totalité. Et bien, si vous êtes peu vigilant, il existe des outils où vous prendrez un risque supérieur aux sommes que vous aurez investies. Mais comment est-ce possible ?
Tout bonnement par le biais de contrats et de produits dérivés. De plus en plus de plateformes de trading proposent des moyens simples et alternatifs d’investir même en période de confinement. Tellement simples que savez-vous au final ce que réellement vous achetez ?
Un des 10 préceptes de Warren Buffet est de toujours investir dans des valeurs qu’il comprend. Faîtes vous confiance en vous faisant un avis par vous-même. Bien entendu, des avis externes son toujours les bienvenus !
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Aujourd’hui, j’aime mettre à profit mes compétences et mon passé d’Ingénieur patrimonial pour apporter de la pédagogie à un domaine qui en souffre cruellement. Car la gestion de patrimoine, c’est avant tout une relation de confiance entre le client et son conseil !